La TVA a vocation à être assise sur le prix (ou contre-valeur reçue) d’une opération imposable et donc réalisée à titre onéreux. L’article 271 du Code Général des Impôts prévoit que la TVA qui a grevé les éléments du prix d’une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération.
Qu’en est-il lorsque cette opération est en partie réalisée gratuitement ? Instinctivement, le fiscaliste se réfugie derrière la notion de coefficient d’assujettissement avec, à la clef, une diminution du montant de TVA déductible.
Le 8 novembre 2018, au travers d’une réponse Ministérielle Mouiller : Sénat 8 11 2018, n°5054, l’Administration a admis qu’un exploitant public de stationnement de véhicules dans un parc aménagé à cet effet qui met en place « la première heure gratuite » ne voit pas ses droits à déduction diminuer en présence d’une prestation réalisée gratuitement.
Elle justifie sa position au regard de la jurisprudence de la CJUE.
Il est fort probable que la jurisprudence visée (mais non citée) soit celle rendue le 22 octobre 2015 dans l’affaire C-126/14 SVEDA UAB. Une jurisprudence qui a surpris bien des spécialistes de la TVA tant l’analyse des magistrats sur la notion de lien direct fut extensive.
En d’autres termes, les magistrats ont considéré dans l’arrêt SVEDA UAB précité, que la TVA grevant des investissements destinés à être utilisés gratuitement par le public mais permettant à l’exploitant de réaliser des opérations taxées, était déductible au motif qu’il existe un lien direct et immédiat entre l’acquisition de ces investissements (réalisation d’un parcours récréatif) et l’activité imposable de l’exploitant (hébergement, alimentation, boisson, organisation de salons et congrès).
Le Conseil d’Etat s’est déjà prononcé en 1986 dans un célèbre arrêt Terrabâtir (CE 7e -8e ss, 7 05 1986), sur la possibilité de déduire la TVA grevant les travaux d’aménagement d’une parcelle remise gratuitement à une collectivité à la condition de pouvoir démontrer que le coût de ces aménagements constitue un élément du prix de revient des parcelles vendues (et donc imposables à la TVA).
La présente réponse ministérielle ajoute une pierre à l’édifice de l’argumentaire plaidant pour la possibilité de déduire la TVA même en présence d’une opération gratuite.
La gratuité dans les opérations (du secteur concurrentiel ou assujetties en vertu de la loi) réalisées par les collectivités locales est un sujet d’actualité.
La TVA étant devenu un véritable enjeux budgétaire pour ces dernières, il conviendra d’avoir en tête cette réponse ministérielle lors de l’analyse des diverses situations de gratuité qui se présentent à elles.